Avec Claire Duvivier, Guillaume Chamanadjian, Laure et Laurent Kloetzer
Animation : Clément Pélissier

Dans La Science du Disque-Monde (1999), Terry Pratchett s’interroge, avec Ian Stewart et Jack Cohen, sur l’existence d’un lien entre science et magie. Le narrativum, l’impératif de narration, met en effet la magie au service du déroulé d’une intrigue, c’est le cas dans le merveilleux des Contes comme ceux de Perrault, qui n’hésite pas à contrebalancer les effets surnaturels des bottes de Sept lieux par un soudain prosaïsme, et à jouer sur l’écart entre merveilleux et réalisme.

Pourtant, la magie ou la sorcellerie, quand ils sont adossés au principe de causalité, ne relèvent ni du miracle, ni même du caractère délibérément arbitraire du merveilleux des contes de fée. Et à regarder l’évolution de la littérature de l’imaginaire, notamment en fantasy, on ne peut s’empêcher de remarquer que les grandes sagas populaires empruntent, peut-être de plus en plus, à cette logique : ainsi, dans Harry Potter, la magie s’apprend.

Bien qu’il s’agisse de psalmodies, de non de chocs mécaniques et de principe d’inertie, de mêmes causes entraînent de mêmes effets ; les disciplines les plus éthérées, comme la Divination, sont raillées par les esprits rationnels ; la magie n’a pas seulement des règles, elle a des lois formulées sur le même modèle que celles de la physique, comme si le surnaturel devait obligatoirement se doubler d’une justification scientifique suffisamment crédible pour suspendre l’incrédulité du lecteur. Cette tendance s’est-elle généralisée, et si oui que révèle-t-elle sur nos conceptions du surnaturel ?

Motivé·e·s par leur libido sciendi et leur expérience d’écrivains de fantasy et/ou de science-fiction, nos invité·e·s évoqueront ce qui, dans les univers de fiction, échappe aux lois de la nature telles que les modélisent les sciences modernes dans notre réalité. Composer un univers qui laisse place à la magie, à la sorcellerie, aux savoirs occultes, s’agit-il de mettre en oeuvre d’autres lois, d’autres invariants diégétiques dont on pourrait tirer une science fictive ?

Et si oui, les auteur·ice·s sont-ils conscient·e·s du modèle qu’ils empruntent à la science ? S’agit-il d’un impensé ou au contraire, comme le génial Terry Pratchett, s’amusent-ils à détourner et subvertir les codes de la scientificité, nous rappelant au passage cette chose fondamentale, à savoir que la science est aussi d’abord, une création humaine qui puise au même langage de la fiction ?

Dans le cadre de la 11e édition du festival Les Intergalactiques le samedi 15 avril 2023.

Site internet du festival :
https://intergalactiques.net